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Lumière sur Pierre Créac’h

Pierre Créac’h a eu plusieurs vies. Musicien et dessinateur, il mène de front une activité d’auteur, d’illustrateur et de compositeur. Son premier album, Le silence de l’Opéra, dit par Jean Rochefort, est devenu un classique. Sept ans de travail et de réflexion plus tard, il crée Le Château des pianos, dit par Pierre Arditti, Plume D’Or et Grand Prix du livre audio 2015. Le fantôme de Carmen est le troisième et dernier ouvrage de cet auteur rare, toujours aussi ambitieux dans sa démarche.

Un parcours atypique

Le premier amour de Pierre Creach est la musique. Sa voie semble se tracer naturellement après le lycée, et avec les honneurs. Il remporte la médaille d’or à l’issue de sa formation au Conservatoire de musique de Montpellier, où il se spécialise entre autres en tant que pianiste et compositeur.

Mais, issu d’une famille de peintres (sa mère, son grand-oncle, son frère, et bien d’autres !), il se prend aussi d’affection pour les arts graphiques. Il rejoint alors l’école Penninghen qui lui permet de découvrir une grande variété de techniques. Son coup de foudre, et là où il se sent le plus à l’aise : le crayon. Il n’a d’ailleurs jamais quitté cette école où il enseigne le dessin depuis plus d’une décennie.

Le silence de l’Opéra, son premier livre en tant qu’illustrateur, auteur et compositeur, fut d’ailleurs à l’origine son projet de fin d’études. Et quelle conclusion magistrale ! Avec, il séduit une alors jeune maison d’édition, Sarbacane, qui portera son projet au sommet. Ensemble, ils convainquent le grand comédien qu’était Jean Rochefort de narrer son histoire sur le CD audio qui accompagne le livre. Pari réussi, puisque l’album a sur conquérir le public en un clin d’œil !

Une image qui chante, une musique qui montre

Les livres de Pierre Créac’h sont rares : depuis le début de sa carrière en 2007, il n’en a publié que 3. C’est parce que chaque livre est un projet de longue haleine, qu’il fait murir dans sa tête et sur papier parfois pendant des années. Après le coup de feu que fut Le silence de l’Opéra, il attend 7 ans pour se relancer dans l’aventure, avec Le château des pianos. Puis, 2 ans plus tard, paraît son troisième et à l’heure actuelle dernier opus, Le fantôme de Carmen. Vous l’avez peut-être remarqué aux titres : chacun tisse une histoire autour de la musique, ce qui se ressent dans les images.

Entièrement réalisées à la mine de plomb, un crayon assez proche du fusain mais plus sec, ses illustrations reposent sur les contrastes entre le blanc de la feuille et les variations de gris obtenus avec la mine. Des tons neutres pour mieux laisser la musique du CD porter une farandole d’émotions, mais qui ne sont pas exempt d’une certaine vibration. On ressent dans les traits la puissance du geste, comme si les coups de crayons avaient été donnés au rythme de la mélodie. Esthétiquement, ses scènes parfois farfelues, et souvent emportées sur la page, avec des notes qui virevoltent et des instruments qui prennent vie, ne sont pas sans rappeler le conte d’Alice au pays des merveilles, dont les diverses adaptations illustrées ont bercé des générations d’artistes de 1865 à aujourd’hui.

Dans leur aspect extérieur autant qu’intérieur, les albums fonctionnent comme une série dont on peut faire la collection. On peut même dire qu’ils se lisent de concert !

Un succès au rendez-vous

Ses albums, lus par de grands comédiens français (Jean Rochefort, Yolande Moreau et Pierre Arditi) font l’événement. Il remporte même le prix Charles Cros pour Le silence de l’Opéra, et la plume d’or et du livre audio 2015 pour Le château des pianos. Les dessins de Pierre Créac’h séduisent aussi les professionnels de l’art. Ses originaux se sont entre autres portés sur les côtes de Saint-Malo, Deauville et Cherbourg, et ont même pris l’avion pour l’Italie et la Corée. Depuis 2016, il les propose à la vente sous forme de lithographie à la Galerie Robillard et sur les nombreux salons auxquels il participe.

Même s’il ne publie pas beaucoup, Pierre est un grand rêveur : de nombreux projets germent dans son esprit et sur le papier (ce que vous pouvez suivre sur son Instagram), et il a attend toujours le bon moment pour les révéler. Une rareté qui rend ses créations d’autant plus précieuses. Il part d’ailleurs toujours d’histoires qu’il a vécues. Par exemple, le château existe bel et bien, ancienne propriété d’un collectionneur un peu fou d’instruments !

Pauline Illa